
La Coopérative-Musée Cérès Franco a reçu l’appellation Musée de France.
Bravo ! ne boudons pas notre plaisir, car mieux vaut tard que jamais.
Enfin ! Après un demi siècle d’ignorance, de mépris, voire d’invisibilisation , l’appareil institutionnel, par le truchement de son Haut Conseil des Musées de France, vient de concéder cette reconnaissance a minima à cette collection de haute valeur historique et patromoniale , qui compte 1 651 œuvres de 348 artistes auxquels il convient d’ajouter une centaine d’artistes inconnus ou anonymes. 56 nationalités et quatre continents sont représentés avec une forte représentation des artistes de l’Europe et du continent américain.
Sur les 438 artistes, moins d’une dizaine probablement figurent dans les collections des FRAC… Presque tous, en revanche, sont dans le nicolemuseum.fr
Voici les artistes de la collection Céres Fraco :
https://www.museeceresfranco.com/fr/ex positions-et-artistes/artistes
Que signifie cette brusque reconnaissance officielle du Musée de Céres ?
Faut-il la voir comme une entourloupe bureaucratique permettant la récupération à moindre frais d’années de travail d’un réseau d’amis et de mécènes privés ?
Ou bien faut-il voir ça comme le symptôme d’un affaiblissement global du radicalisme ou du totalitarisme conceptualo-bidulaire imprégnant la mécanique ministérielle ?
| La présence de Catherine Millet , dans le « Collège de Gouvernance » pour la Valorisation de la Collection Cérès Franco , reste étonnante voire inquiétante, quand on sait que les options esthétiques de dame Millet étaient à l’exact opposé de celles de Cérès Franco…Le pire à craindre serait qu’avec cette appellation- mise sous tutelle, le Musée de Céres se voit contraint d’y héberger des œuvres d’art contemporain de type concetualo bidumlaire pour « dialoguer » avec les celles des artistes « non-contemporains » de Céres, comme cela se fait dans quantité d’autres Musées de France |
Voici le communique officiel de cette distinction :
Par arrêté préfectoral du 1er décembre 2025, et après avis positif du Haut Conseil des Musées de France rendu le 4 novembre, la Coopérative-Musée Cérès Franco a reçu l’appellation Musée de France. Cet acte marque une étape majeure pour l’avenir du musée, qui prépare son installation dans un lieu entièrement rénové à Montolieu (Aude).
L’obtention de cette appellation vient récompenser le travail du musée depuis sa création, en 2015, qui s’est toujours donné pour objectif l’obtention de cette reconnaissance accordée par le Ministère de la Culture. En soulignant la singularité de la collection et son apport à l’histoire de l’art de la seconde moitié du XXème siècle, l’Etat reconnait également la qualité d’un projet culturel et architectural exceptionnel, symbolique de l’importance de la culture en territoire rural.
Cette reconnaissance n’aurait pas été possible sans l’implication des collectivités territoriales contributrices au profit du programme de modernisation du musée, et notamment de la Région Occitanie et de Carcassonne Agglomération. Le musée réunit également le Département de l’Aude, la commune de Montolieu et l’Association de Valorisation de la Collection Cérès Franco (AVCCF). Ces structures se sont toutes unies au profit de l’émergence d’un projet culturel de qualité, ouvert à tous et pour tous, ainsi que Cérès Franco l’a souhaité de son vivant. Le chantier du musée reçoit également par ailleurs le soutien financier du Fonds Vert, piloté par la Préfecture Occitanie, et de l’Union Européenne à travers le Fonds Européen de Développement Régional (FEDER).
Cette appellation conduit à l’inaliénabilité et l’imprescriptibilité des collections du musée, qui bénéficient du soutien de l’Etat quand à leur conservation et leur valorisation. Elle permet également une visibilité accrue du musée auprès des chercheurs et du public.
L’obtention de l’appellation Musée de France s’inscrit dans un moment de transformation profonde : La Coopérative-Musée Cérès Franco prépare sa réouverture dans l’ancienne cave coopérative, entièrement réinventée par le cabinet d’Architecture Passelac & Roques. Pensé pour accueillir davantage de visiteurs, ce nouveau bâtiment permettra de renforcer les actions culturelles à Montolieu, mais aussi d’offrir à tous des conditions de visite adaptées et de faire rayonner la collection sur notre territoire. Les travaux sont sous maîtrise d’ouvrage de la Région Occitanie.
Tout sur la Coopérative-Musée :
Maximilien Fortier, Directeur et conservateur du patrimoine, Christophe Rey, Responsable administratif et financier, Cecilia Matteucci, Directrice artistique et coordinatrice de projet, Irène Daniaux, chargée de la communication et de mécénat, forment l’équipe de La Coopérative-Musée Cérès Franco.
https://www.museeceresfranco.com/fr
La Coopérative-Musée Cérès Franco
5 Rue d’Alzonne
11170 Montolieu
04 68 76 12 54
info@museeceresfranco.com
https://www.museeceresfranco.com/fr
VOICI QUELQUES TEXTES QUE J’AVAIS ÉCRITS SUR CÉRES FRANCO
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DU REFUS DE LA DONATION CÉRES FRANCO PAR LA VILLE DE CARCASSONNE
La fantastique, inouie, unique, merveilleuse, collection d’art singulier (mais pas seulement puisque quantité d’artistes n’ayant rien à voir avec cette catégorie y figurent) que la mythique mais bien vivante Cérès Franco voulait donner au Musée de Carcassonne vient d’être refusée par la nouvelle municipalité de cette ville… On pleurerait de rage devant autant de désinvolture et d’incurie des responsables politico culturels… On pense à la collection d’Art Brut de Dubuffet, refusée par la ville de Lyon et qui honore la ville de Lausanne…On pense à celle plus récente de Richard Treger qui a dû s’exiler au Portugal, etc. .. Irresponsabilité et ignorance des politiques actuels, certes…mais, bien entretenues par quarante ans de mépris ministériel pour toute expression humaine et sensible dans l’art.(quand par ailleurs on soutient à grand frais l’odieuse collection Lambert) ….Pensons aussi à la fabuleuse et unique au monde collection de « livres uniques d’artistes » de Caroline Corre à Verderonne, ignorée de la DRAC autant que des collectivités locales alentour.
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POURQUOI LA COLLECTION CÉRES FRANCO N’A JAMAIS EU LA RECONNAISSANCE INSTITUTIONNELLE QU’ELLE MÉRITAIT

…La « pensée artistique » du Ministère, serait-elle d’un autre ordre qu’artistique ?
Cérès Franco, 92 ans, figure mythique dans le paysage de l’art en France, qui avait ouvert en 1972 sa galerie « l’Oeil de Bœuf » , rue Quincampoix à Paris, a pu , en 4 décennies, constituer une fabuleuse collection de plusieurs milliers d’œuvres, que certains, comme pour se protéger de ce souffle de liberté qui en émane, enferment volontiers dans la catégorie « Art brut et singulier »… pourtant trop étroite pour un ensemble d’une telle ouverture sur la création de notre temps.
Alors, est-ce ce vent de liberté, qui explique qu’aucun ou presque des artistes de cette collection ne figure dans les collections d’Etat de type musée ou FRAC ?
Est-ce cette joyeuse non-conformité aux tristes critères de légitimation officiels qui a fait que cette collection aurait pu rester cachée dans la maison de Cérès à la Grasse, s’il n’y avait eu cette providentielle rencontre avec l’excellent Henry Foch ?
Celui-ci, en effet, banquier passionné d’art et ayant quitté ses fonctions, parce qu’écoeuré par les pratiques financiaro-spéculatives en art tout particulièrement, prit la décision d’acheter la coopérative viticole désaffectée située au village de Montolieu, à 30 km au nord de Carcassonne, pour y héberger et y montrer en permanence la collection de Cérès.
Le succés est total, en termes de fréquentation, pour ce lieu d’art très inspiré, hors des circuits centripètes étatiques et de haute vertu en termes de « revitalisation des territoires » …Merci Mr Foch…Merci à Cérès à sa famille et à ses amis et pour tout cela !
(sur les liens ci-dessous, on peut avoir un aperçu de la somptueuse collection, et voir la céleste Cérès au vernissage de la récente exposition temporaire « Les Croqueurs d’Etoiles »)
Demeure cependant , au-delà de cette réussite réconfortante, une interrogation de fond très importante, voire inquiétante comme menace pour l’avenir de l’art : qu’est-ce qui fait que les acteurs des réseaux institutionnels et grands marchands de l’art ignorent à ce point l’art et les artistes de Cérès ? Pourquoi ce type d’art sensuel, poétique, bio-éthique, aimable, sociable, respectueux de l’environnement, inventif, sans fumées discursives toxiques, chaleureux, généreux, n’est-il pour eux qu’objet de rejet, de mépris, de dégoût probablement, d’ incompréhension, de déni de toute valeur esthétique ?
Le ressentent-ils comme un art de pestiférés inregardable, parce qu’ anti-contemporain, non-commentable, non-financiarisable, et dont ils doivent donc se protéger? Ces gens allergiques à ce type d’ art, sont-ils d’une essence génétiquement améliorée ou dégradée par consanguinité, différente ou supérieure ? Appartiennent-ils à une autre et nouvelle espèce humaine, apparue par une sorte d’étrange mutation brusque, et n’ayant plus rien de commun dans son appréhension du monde, avec la précédente ? S’agit-il d’une nouvelle variété d’homo super-sapiens ultra-conceptualiste et analgésique, dont la survie nécessite un rigoureux éloignement prophylactique avec l’expression primitive, brute, sensuelle, poétique, tripale, tribale, généreuse, barbare, instinctive, caractérisant les artistes homo-strictu-sapiens de la collection Cérès Franco ?
Tout reste donc à faire pour élucider ce mystère…
Pourquoi ne pas reconnaître dès aujourd’hui l’importance historique de Cérès Franco, sans attendre le jugement d’une histoire de l’art à laquelle on ne peut faire totalement confiance. (Rien ne prouve en effet que l’histoire des réalités prenne le pas sur celle des apparences telle que nos actuels historiens-critiques d’art nous l’imposent comme bruyant effet Larsen d’un système de reconnaissance où les crétins doctes font la loi).
Bref, si l’art et le marché de l’art n’ont pas tout à fait perdu leur sens et s’il est encore permis d’espérer de l’art et des artistes, c’est bien grâce à des gens comme cette grande dame de l’art contemporain.
Nous voulons donc ici lui rendre hommage par un rapide parcours au milieu d’une fabuleuse collection de souvenirs, de non moins fabuleux artistes qu’elle a découverts.
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BRÈVE HISTOIRE DE CERES
AVANT L’OUVERTURE DE SA GALERIE

La démarche de Cérès fut dès le départ en rupture avec la pensée inter-nationaliste: cette espèce de rumeur ectoplasmique qui vient-on ne sait d’où, pour aller nulle part et qui régulièrement impose telle ou telle tendance sur le marché et dans le discours des sophistes fonctionnarisés.
En 1964 on était en pleine frénésie abstracto-lyrique et Cérès montait sa première expo à la Galerie Relevo de Rio de Janeiro intitulée Nouvelle Figuration de l’Ecole de Paris avec Bertini, Arroyo, Aillaud, Recalcati, Marcos, Varnarsky En 1965 ce fut opinions 1965 au Musée d’Art Moderne de Rio de Janeiro où elle confrontait les œuvres de peintres de la nouvelle figuration Européenne à des peintres brésiliens naturellement néo-figuratifs. Elle révélait ainsi en pleine dictature des « abstraits-lyriques» l’existence d’une figuration brésilienne non naïve.
Puis elle organise des expositions de peintres brésiliens d’inspiration populaire à Paris, à Moscou, à Varsovie. Expositions préfacées par Jacques Lassaigne.
De 1969 à 1972, elle est membre du Jury de la Triennale de Bratislava et commissaire pour le Brésil.
Cette triennale montrait ce qu’on appelait à l’époque l’Art Insitic c’est-à-dire inné concept voisin, bien entendu, de celui de l’art brut, singulier, populaire, etc… l’art de gens « habités ».
… Et oui, on s’intéressait à cette époque à ce type
de création et c’était présidé par Michel Butor…
En 1972 elle lance sa galerie de la rue Quincampoix avec une rétrospective des chroniques de l’Œil de Bœuf.
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LES ARTISTES QUI SONT PASSES CHEZ CERES FRANCO
En feuilletant albums et catalogues j’ai essayé, de façon un peu aléatoire, de reconstituer la liste des prestigieux artistes qui ont exposé chez Cérès Franco et dont beaucoup ont été révélés par elle grâce à une première exposition. Voici donc cette liste dans le désordre le plus total et en espérant qu’il n’en manque pas trop :
A. SZAPOCZNIKOW – GAMARRA – A. MARCOS – VANARSKY – E. LARUS – RUSTI- -CORNEILLE LUCEBERT DOUCET – AÏNI – HADAD – NITKOWSKY – CHAÏ-BIA J. ANTUNES C. BOIX-C. CEHES MEN-DIVE -DA COSTA – JABER -J. CRITON
MONTGILLAT- M. DORS -S. MERCADER D. SIMON-FAURE – J. GRINBERG W.
DEUS M. HENOCQ – PAULINA V.- MORGADO – J.M. GAULTHIER -MURUA -H. LOREDO – E. WERNECK – F MELO – R. CIESLEWICZ – TAILLANDIER
Y TANIKAWA- J. WATA-POUGET – G. LATIER – J. DUNCAN – M. DEVITT BADIA – F. SHIRO – MAO – D. ACHIES – TESSIER – B. HANSSEN- S.
PICCIOTTO – MITA – M. KIROPOL -D.KAZAKOV – L. LAURIN-LAM IVAN-KOVITCH – NETTO- ALYANNE- J.M. MARTIN – ATILA- C.BOUJON – J. de GUIMA-RAES – B. SELASSIE – HAJERI – B. LEUS- MACREAU.
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LA VIE DE CERES FRANCO : UN ACTE ARTISTIQUE CONTINU ET INCOMPRABLE
Par Raymond Perrot (texte écrit en 1988)
« Le bouillonnement coloré, le trait cruel, la figure fantasque, la texture primitive davantage que naïve, la posture sans complexe, la vérité à dire… » RP
Peut-on être dans le marché de l’art un personnage à part, un marchand vers qui l’on coule un regard étonné, encore aujourd’hui étonné alors que plus rien ne nous surprend du dol-l’art et du vide-art? Un personnage, et c’est une femme. Des grands marchands ont surgi depuis quelques années, jamais de la stature de Cérès Franco.
Mieux, c’est autour d’elle, de sa galerie rue Quincampoix, que sont venues se regrouper d’autres galeries, de plus en plus luxueuses et de plus en plus vastes, tout un apparat de courtisans de Beaubourg, vrais amis du Musée d’Art Moderne quand celui-ci les sollicite d’achats somptueux. Et oui, la galerie Cérès Franco date de 1972!
Et dix ans auparavant, en 1962, l’attirante et pétulante Cérès, historienne d’art et critique d’art, inventait son label, son titre-roi qui la mit en rapport avec une foultitude d’artistes aussi jeunes et remuants: l’Œil de Bœuf. « Il y a quarante ans » dit-elle avec une nostalgie feinte, car elle sait que si bien des choses ont changé, le même cœur de l’art bat chez elle et chez les peintres qu’elle préfère. Que cherchait-elle alors, que cherche-t-elle aujourd’hui qui caractériserait son acte artistique continu et incomparable?
L’exposition de 1962, basée sur le curieux format ovale ou rond de tous les tableaux, baroque Œil de Bœuf, allait prendre à la source une peinture de gestes authentiques et de verve romantique. Les Macréau et Duque, Gillet et Barré, avaient sans doute en commun ce « lyrisme » qui avait qualifié une abstraction informelle et qui annonçait des images captatives, relationnelles, humaines, de communication mystérieuse avec les fonds sensibles.
A la même date, Cérès Franco regroupait 50 sculpteurs dans son exposition Formes et Magie, au bowling du Bois de Boulogne, et ce qu’on devinait chez Corneille et d’autres s’incarnait ici dans la figuration nerveuse des Chavignier, Germaine Richier, César… En 1963, le deuxième Œil de Bœuf totalisait 182 artistes!
Etait-ce la volonté de servir un expressionnisme? La suite a montré que cette expressivité « magique » Cérès Franco l’encourageait par un processus d’accords personnels – pourquoi pas venus de son origine brésilienne – accords sur le bouillonnement coloré, le trait cruel, la figure fantasque, la texture primitive davantage que naïve, la posture sans complexe, la vérité à dire… Si bien que la figuration, en tant que tendance, fut d’emblée présente, mais figuration sans références académiques et nous offrant plutôt le reflet de notre bougement émotionnel, de notre révolte folle, de notre liberté difficile, de nos envies inavouables, de notre gaieté soudaine.
Alors le fonds qui s’est peu à peu constitué, par les démonstrations de la galerie et par es achats continuels, est devenu le fonds d’une partie de l’histoire de l’art pas du tout conventionnelle, pas celle coincée dans les FRAC et les musées en tout cas! Ici la vie submerge la forme hygiénisée, polie et laquée de nos institutionnels timides. Les images regorgent d’inattendu et de criant, de Rustin à Jean-Marc Gauthier
En attendant un hommage redevable à cette aventure de l’expression qui se confond avec l’aventure du goût d’un marchand, on suit cette idée à peine délirante de Cérès Franco de remplir une maison du Midi par sa collection haute en couleur, en rires et en drames, en formes libres et en forces vives. A quand la création d’une association des Amis de la Collection Cérès Franco ? ….Cette association existe. Son siège social est dans la maison qui hébergera la collection et sera inaugurée courant 1992 fdans le village de La Grasse
Raymond Perrot
Peintre écrivain essayiste. Il faisait partie du groupe
DDP qui réunissait, en 1973, trois enseignants en Arts plastiques, François Derivery, Michel Dupré, Raymond Perrot, qui s’étaient rencontrés lors de leurs études en 1956-59. Il s’agissait de mettre en commun moyens et ressources de chacun en vue de réaliser et diffuser des travaux artistiques de tous ordres (textes, films, peintures…) selon le principe coopératif, mettant en commun expériences, compétences, exigences de chacun.