ÉLISABETH BAILLON : TÉMOIN D’UN LARZAC AUSSI POÉTIQUE QUE POLITIQUE

Il manque , le plus souvent, aux politiques une dimension poétique, qui les rendraient plus attachants, voire convaincants.

Nous avons eu Georges Pompidou qui avait cette dimension.

Nous avons eu  François Mitterrand qui l’avait aussi ….ce qui le rendait « pas complétement mauvais » , malgré son copinage avec son mauvais génie Jacques Lang, qui nous nous a donné un art contemporain plus idéologique qu’artistique et plus politique que  poétique : un désastre  dont on ne s’est par encore débarrassé après 50 ans de ravages.

Les moutons du Larzac sous la Tou Eiffel en 1772

Elisabeth Baillon est une des figures historiques  du Larzac en lutte. Elle fut la femme-artiste brodeuse de laine dans une lutte de paysans bergers de moutons. C’est elle et son époux qui avaient installé un troupeau de moutons sous la Tour Eiffel au début des années 70 (image jointe). C’est elle qui faisait partie du groupe de paysans qui avaient exfiltré François Mitterrand menacé de lynchage par les terrifiants maos kampoutchéa démocartiques de Geismar , quand Mitterrand était venu au Larzac faire une opération de communication récupératrice et concurrente de celle de son ennemi Rocard qui faisait la sienne au Festival D’Avignon….Grande et fabuleusement poétique époque !

En cette triste présente époque où au nom du progressisme on vide l’art pour le bourrer d’idéologie, ou des hordes d’ artistes conceptualo-bidulaies et socioalo-questionnatoire bidons, déservent l’ar autant que les causes qu’ils font semblant de soutenr ; il existe de vrais artistes à contenu comme Elisabeth Baillon qui ont été de vrais militants pour de vraies causes…Et c’est pour cela qu’ai pensé nécessaire de présenter son œuvre et de publier cette lettre qu’elle vient d’adresser au poète- écrivain Jean-Pierre Simiéon, et qui évoque au mieux ce vertueux mais quasi impossible  compagnonnage entre le poétique et le politique

LA LETTRE D’ÉLIZABETH BAILLON À JEAN-PIERRE SIMÉON                                                                                                                

                                                                                                                                         Millau,  27 août 2023

Bonjour Jean -Pierre Siméon,  Ah !vous dire que vos poèmes m’enchantent et que ce plaidoyer pour la poésie me va droit au cœur ;  Cela rejoint Jacques Ellul, qui, dans son livre au si beau titre «  La parole humiliée », écrivait  il y a 40 ans, on finira par communiquer comme les militaires : « Je vous reçois 5 sur 5 ».On y est !

Mais je désire vous parler ici de la lutte du Larzac  de la décennie 70

Du Larzac ce sont ses moments poétiques qui resteront dans l’histoire !

En 1982 après la victoire du Larzac, histoire que j’ai vécue de bout en bout pendant dix ans, nous les acteurs avons voulu raconter cette épopée qui finit si bien, dotée d’ un scénario en or : des paysans contre des militaires. A noter que c’est un poète qui démarre cette histoire en 1972 et non un politique : Lanza del Vasto. Désir en 1981 chez nous de témoigner  au grand public des « secrets » de cette lutte contre le Pouvoir d’Etat. Rien que ça ! J’ai été chargée de cette tache, alors que je ne suis ni historienne ni muséographe, mais artiste plasticienne, (comme on dit affreusement maintenant). Pour illustrer les moments significatifs de ces 10 années  qui restaient en mémoire j’ai demandé à une quinzaine de paysans les plus impliqués : « Qu’est ce que tu raconteras à tes petits enfants de ces dix ans ? » Ce qui ressortit de leurs souvenirs ce furent non les avancées politiques mais les moments poétiques, émouvants, drôles, dramatiques : brebis sous la Tour Eiffel, troupeau au tribunal, jeûnes avec Lanza et les évêques, discours enraciné et tremblant d’un berger, camping d’ une semaine sous la tour Eiffel etc. Désir fort de témoigner de cet affectif vécu dans la durée qui nous  fit tenir le coup. Cet affectif qui fut une force et que les historiens sont incapables de percevoir aux archives. Cette petite troupe modeste de ploucs s’opposant à Michel Debré, vous vous rendez compte ? Sur 90% des choses, chez certains, on n’étaient pas d’accord, mais sur les 10% on avançaient ensemble, et, dans  la durée on s’est transformés en se frottant parfois rudement. Pratique non violente. Réunir FNSEA, paysans travailleurs, Mao, chrétiens de gauche ou intégristes, le PSU, les babas cool ( appelés  ici les bourrutch ou «  les sarcleurs de guitare » (si c’est pas de la poésie ça ?) Et, paradoxe ravageur le chef des paysans, mon voisin, était un ancien colon d’Afrique, lieutenant de réserve…Du coup  une perception très fine de «  l’ennemi » chez cet homme de pouvoir. Les belles analyses marxistes de nos universitaires devaient  rhabiller leurs idéologies ou trouver une autre lutte. Oui, J’ai vu de près comment se fabriquent les mythes ! Privilège magnifique de cette naissance.  Telle une œuvre d’art ! Autre chose que les installations des FRAC totalement dans le conceptuel. Merci pour votre ironique allusion que je partage.

Ci-joint une petite plaquette vieille de plus de 40 ans, pleine de ferveur pour un fervent.

 Et un petit éventail des réflexions qu’un paysage aussi peu « français » que celui du Larzac suscita. Ma préférée celle du viticulteur de la vallée à des touristes qui lui demandent : c’est comment là haut ?  et qui leur répond : Même les corbeaux, pour le traverser, ils prennent la musette »

En tant qu’artiste ayant retrouvé mes propres sabots je crée depuis 2 ans des livres brodés . Utilisant, après enchantement, des auteurs aimés :Claudel (eh oui ! ) celui du Partage de Midi. (j’adore cette fournaise chez Mr  l’ambassadeur) Et Bachelard qui nous manque tellement aujourd’hui, Char,  Jouve, Gracq, Aragon, Jammes, Labé, Desnos… Et Péguy qui aurait tant aimé la lutte du Larzac…

… Et vous, bien sur ! en complicité émue avec : Je dis Amour avec majuscule, et  il arrive oui qu’on meure. L’un offert à l’homme que j’aime et l’autre à une amie qui l’a perdu cet homme.

Je n’aurais pas osé vous contacter si je n’avais pas regardé une vidéo de vous. Vous dire donc que votre combat est partagé et que si cette lutte du Larzac a gagné c’est que sa communication était plus que politique, poétique  donc symbolique car parlant au profond des êtres. Seulement elle jouait sur la durée avec des paysans qui savent qu’il y a quatre saisons.(L’administration n’est pas au courant) Aujourd’hui nous sommes dans la violence de la vitesse. Maintenant tout est maintenant comme dit Régis Debray.

Bien sympathiquement à vous cher Jean-Pierre Siméon

Elisabeth Baillon

Plus d’infos sur Jean-Pierre Siméon ici :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Pierre_Sim%C3%A9on

Plus d’infos sur Elizabeth Baillon

Elisabeth Baillon artiste plasticienne, habitante du Larzac de 1970 à 2004. Responsable de 1982 à 1991 de l’Ecomusée du Larzac, chargée par l’Association Pour l’Aménagement du Larzac des expositions témoignant de l’histoire de la lutte contre l’extension du Camp militaire reliée à son patrimoine sauvegardé. Elle fut maire adjointe à la Culture de la ville de Millau (1989/1995).

https://elisabethbaillon.com

Elizabeth Baillon au Salon de Montrouge…

Petite histoire assez cocasse mais significative de l’inepte artistique dominant.

Plutôt surprise par l’invitation qui lui fut faite par ce prestigieux salon du jeune plasticien conceptualo-bidiuaire, frais décérébré d’une école des Beaux-Art et en voie d’émergence sur la scène artistique internationale, elle compris assez vite qu’elle avait été invitée, non pas pour la qualité intrinsèque de son travail, non pas non plus pour son passé de militante, mais simplement parce qu’il leur fallait une artiste femme  du quatrième âge,  au nom de l’ouverture à la diversité.

Lire ici la tartine mots écrits par une jeune critique d’art émergente, elle aussi, sur « la scène artistique internationale »

https://www.ville-montrouge.fr/uploads/Epublication/42/150_118_Catalogue-67eme-salon-de-Montrouge-1.pdf

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