Voici une expo qui s’intitule « Le jour des peintres » . Elle aura lieu le 19 septembre : un seul jour, pas un de plus. Elle présentera, très furtivement donc, 80 peintres « contemporains » choisis sur la scène française, qui iront délibérément à la rencontre des visiteurs (On se demande à quelle autre rencontre ils pourraient bien aller, mais qu’importe)
On affiche délibérément aussi leur 80 visages dans le dossier de presse, comme pour bien montrer leur réalité physique et leur miraculeuse présence dans le PAF (paysage artistique français) , car ils sont censés être les héros de ce prodigieux quoique rapide retour de la peinture au pays.
Cet événement témoignera, disent les concepteurs de cette manifestation, « d’une vitalité de la scène française encore trop méconnue du grand public. »… Concepteurs qui ne manquent donc pas de culot, car ils appartiennent au système-même qui a ringardisé la peinture, et permis sa « méconnaissance » par le grand public.
Tout cela paraît néanmoins plutôt positif de prime abord et cela se passe dans un lieu plutôt sympathique où l’on a vu quantité d’expos d’une picturalité de bon aloi…
Mais on reste tout de même perplexe. On subodore la fourberie. On se pose des questions.
- S’agit-il vraiment d’une divine réhabilitation de la peinture -peinture après 40 ans de ringardisation de celle-ci par les réseaux intello-financiers spéculatifs dominants ?
- Le pilonnage intensif de Nicole et autres « dissidents » sur ceux-ci porterait-il ses fruits ?
- S’agit-il de l’amorce d’un changement de paradigme de l’art « contemporain », autrement-dit d’un retournement brusque de veste de la part de ses acteurs sentant la révolte des gueux nauséabonds et décérébrés monter dangereusement contre les élites éclairées et sur-intellectualisées ?
Alors on examine la typologie des heureux artistes sélectionnés pour cette fête de la picturance hexagonale… en même temps très respectueuse de la parité homme-femme.
On voit d’abord que le curator ou le chef d’orchestre de cette caco- symphonie picturante est le plasticien Thomas Lévy-Lasne…Pourquoi lui, plutôt qu’un autre ?
La réponse semble être dans cet extrait de sa présentation dans le dossier de presse :
« Lévy-Lasne ne cherche pas tant à faire concurrence au réalisme (de toute manière factice) de la photographie, qu’à explorer avec passion les transformations virtuellement illimitées des espaces et des textures dans une image aussi insignifiante soit-elle. ».. Ainsi cet artiste est providentiel car il entreprend-il de peindre très exactement « ce qu’il voit », aléatoirement et dans une sorte de sur-figuration de l’insignifiance et pour satisfaire sa seule passion ou sa fascination pour le réel vu, sans aucune intention idéologique, voire esthétique,..( image jointe 01)
On ne l’a donc pas choisi par hasard ce plasticien de la neutralisation visuelle pour organiser ce « retour de la peinture » …
Ce « retour » devient donc celui, la queue basse, d’une peinture non triomphaliste avec une dimension d’insignifiance et de vacuité ontologique qui garantit sa non-dangerosité pour l’esthétique dominante de l’appareil d’Etat… Une peinture comme un glacis inhabité, comme espace vide à fonction de pare-feu ou contre -feu .
On note également la présence rassurante d’un comité scientifique d’experts agréés assurant le sérieux de l’opération, comme souvent quand le sérieux frise l’hallucinant ou le grotesque en art « contemporain ».
On note aussi que cette peinture « contemporaine » sera « mise en dialogue » avec les grandes œuvres du passé, comme trop souvent dans les musées réquisitionnés de force pour héberger ce parasitage malhonnête.
En examinant les œuvres des 80 heureux sélectionnés, on constate en effet, qu’en fait de retour , c’est , globalement, celui d’une peinture bien amochée, bien amoindrie et affichant des signes de grande souffrance…Bref, une peinture neutralisée, anéantie par la maladie de progressivite en art.
Hors quelques peintres à la belle santé, libres, généreux, joyeux et vraiment inventifs, comme, Julien des Monstiers , Marcos Carrasquer, Simon Pasieka, qui semblent être ici suite à quelque erreur de casting ou pour fournir quelque caution au reste,
l’ensemble est globalement triste, torturé, rongé et insidieusement distordu par une morbido- conceptualité, qui semble gratuite, mais qui compense le manque de contenu et qui garantit la contemporainité de l’œuvre.
On se demande ce que Mr Levy-Lasne pense de l’oeuvre de Serge Poliakoff par exemple…S’il l’aime ou s’il considère qu’il n’y a rien à y voir.. ou qu’elle n’a rien à voir avec le réel vu…
On se demande également quels ont été les critères de sélection pour constituer cet agrégat des plus hétéroclite. Pourquoi n’y voit-on pas Fabrice Hyber avec ses grands tableaux d’arbres avec leurs abondantes racines souterraines ? Pourquoi n’y voit-on pas Olivier Mosset qui revendique, avec ses monochromes, une sorte d’absolu de la peinture- peinture ? Pourquoi par Niele Toroni, le peintre le plus appliqué du monde avec ses petites empreintes carrée au pinceau n° 50 réguluèrement espacées ?
Manifestement cette exposition n’est rien d’autre qu’une cruelle plaisanterie de fonctionnaires ministériels…mais fort heureusement, elle est de courte durée et n’aura guère de public.
Plus d’infos et images ici :
https://www.musee-orsay.fr/fr/agenda/evenements/le-jour-des-peintres
Je mets en partage le billet de Nicole Esterolle car elle fait bien de souligner cet événement « le jour des peintres » et surtout de le mettre en examen.
En effet notre génération passe , celle des années 50 qui a assisté ahurie à l’éviction de la peinture vivante, le mot peinture ayant été remplacé par « art visuel » et ringardisé à coups de marteau. Il le fallait bien puisque le territoire des peintres devait faire place à celui des successeurs de Duchamp et de la Warhol mania d’abord à Beaubourg et puis partout en France , le pays des peintres. Exit l’Ecole de Paris….quelle horreur cette vieillerie…
Aujourd’hui Beaubourg ferme 5 ans pour se refaire une beauté alors que ce centre est assis sur une montagne de bidules , les mêmes que celle des réserves des FNAC et FRAC dont on ne sait que faire. En passant, je dis merci à Nicole de nous les montrer encore et encore pour voir où vont les finances publiques…. Oui ! C’est embêtant pour l’institution car à force cela devient gênant toutes ces bêtises ! Ressortons vite les peintres. Venez tous rencontrer « la vitalité de la scène française »! Voilà la nouvelle consigne depuis deux ans.
Il y a de quoi rire et s’amuser en effet et …qui sait ? S’intéresser vraiment à ce qui s’est passé;au lieu de nous jouer encore la comédie. Que revive le débat grâce à cette initiative « le jour des peintres » serait un premier pas, voire une bascule. Le public apprendrait bien des choses jusque là cachées.